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A bord du Suffren le moment fort, fut le bombardement de Sébastopol le 17 septembre 1854
Sébastopol était un point stratégique en Crimée, mais les préparatifs furent assez longs, car les anglais tardaient un peu.
Alors, en attendant la bataille, au large de la baie d'Eupatoria, je pouvais voir, au loin, sur la côte, par cette belle journée du 13 septembre, les civils rassembler leurs bêtes avant de fuir.
Puis le lendemain, je me retrouvais au milieu de cette flotte rangée le long du rivage en 4 lignes, une à 600 mètres, la seconde à 800, puis la troisième à 1000 et enfin la dernière à 1200 mètres. Pendant que quelques corvettes et frégates effectueaient des manoeuvres de diversion le Suffren et les autres navires participèrent au débarquement couvrant pas moins de 60 bâtiments de transport.
Puis les jours suivants se déroulèrent la bataille de l'Alma (nom du fleuve sur lequel se trouve aussi Valmy) où les Zouaves du général Bosquet s'élancèrent, sans stratégie précise, à l'assaut de l'artillerie russe.
Mais surtout, vu sa position stratégique, il fallut attaquer Sébastopol.

Le Suffren faisait partie d’une deuxième ligne de navires avec l’Alger, le Jean-Bart, le Marengo, le ville de Marseille, le Bayard et le jupiter. Tous les voiliers étaient accouplés à un un vapeur qui nous aiderait dans les manoeuvres du fait de l’absence de vent et à nous retirer rapidement en cas d’avarie grave
Le matin du 17, à partir de 6 heures 30, l'ordre de faire feu sur la ville était donné. Il faut s'imaginer 14 vaisseaux français, 11anglais et 2 turcs provoquant un déluge de feu et de fer sur la ville. Nous appareillons à 9h30 pour rejoindre notre position dans la baie de Kamiesh.
L’approche n’est pas facile, il faut venir près des côtes sans répondre aussitôt à la défense ennemie et se placer avec calme sous cette grelle de projectiles qui criblent la mer de tous côtés, puis nous passons à l’attaque.


Dans cet enfer, nous n'entendions même plus les ordres des officiers et l'enchaînement des opérations avait fini par nous griser Les officiers ne peuvent contenir notre ardeur et les marins canonniers et moi-même de charger, pointer, et tirer puis de remettre la pièce en batterie avec une activité fébrile".
Pourtant, après un moment d'intense canonnade, nous ne pouvions plus pointer nos armes, tellement il y avait de fumée, et pour le faire, nous guettions, de l'autre côté les étincelles produites par les canons ennemis.
La lutte fut dure et inégale, nos bateaux de bois souffrirent énormément face à une côte truffée de casemates creusées dans le granit qui ne risquait rien.
De notre côté, par exemple, le vaisseau "Ville de Paris" reçut une bombe sur sa dunette au beau milieu de l'état major de l'amiral Hamelin tuant net 2 officiers et en blessant 4 autres. En tout, ce navire fut atteint 41 fois et sa poupe fut arrachée.
Lorsque vous combattez et que vous êtes au milieu de votre batterie, vous avez en permanence la crainte qu'un boulet ne l'atteigne et que les échardes projetées ne vous tue
Mais en principe, les ennemis ne visent pas les batteries. Pour neutraliser un voilier il faut viser le mat de beaupré, ce mat incliné situé à l'avant auquel viennent s'attacher tous les câbles tenant les autres mats ou alors il faut viser sous la ligne de flottaison pour le faire couler mais ce n'est pas facile car les murailles mesurent 40 à 60 centimètres d'épaisseur et les charpentiers sont là pour colmater immédiatement, le mieux est encore de viser la poupe pour briser le timonier et rendre le navire ingouvernable mais là c’était inutile puisque les vapeurs abrités à nos côtés nous aidaient dans la manoeuvre.

Le bilan de cette journée fut au total de 74 tués et 446 blessés, et aucun navire ne fut coulé. Sur terre, c'était encore pire, on dénombrait 1112 russes tués contre 348 alliés.


SEBASTOPOLE
LES NOUVELLES DU FRONT - Ces 14 et 16 septembre, nos troupes ont débarqué à Eupatoria et ont victorieusement combattu sur le fleuve "Alma" le 20